Abousoufiane Elkabouss
Le livre « L’Affaire Ben Barka : La fin des secrets » de Stephen Smith et Ronen Bergman relance la compréhension d’un dossier qui hante encore la mémoire politique marocaine. Grâce à des archives déclassifiées et à de nouveaux témoignages, les auteurs reconstituent avec précision les coulisses de l’enlèvement de Mehdi Ben Barka à Paris en 1965
L’ouvrage met en lumière l’intérêt particulier qu’avaient plusieurs puissances pour la figure de Ben Barka. Son rôle de leader internationaliste, à la tête de réseaux révolutionnaires du Tiers-Monde, l’avait placé au centre d’une véritable guerre d’influence entre services de renseignement. Selon les auteurs, le KGB soviétique, soucieux de gagner du terrain en Afrique, suivait de près son action, tout comme le Mossad, qui cherchait à comprendre la dynamique des mouvements anti-impérialistes émergents. Les services occidentaux, notamment la CIA et la DST française, s’inquiétaient quant à eux de son poids politique croissant et des alliances stratégiques qu’il construisait
Dans ce jeu complexe, Ben Barka n’était pas tant un agent qu’un acteur politique dont chaque camp cherchait à capter l’influence ou à neutraliser le danger potentiel. Le livre révèle comment ces services — marocains, français, israéliens et autres — ont parfois collaboré, parfois rivalisé, créant les conditions d’une opération internationale unique en son genre
Sans résoudre totalement la question du sort de sa dépouille, l’enquête avance des hypothèses crédibles et documentées. Elle rappelle surtout qu’au-delà de la disparition physique, Ben Barka était devenu un enjeu géopolitique dépassant largement les frontières du Maroc
En offrant une lecture renouvelée des responsabilités croisées, ce livre ravive un débat longtemps étouffé : la vérité sur l’affaire Ben Barka reste-t-elle encore enfermée dans les archives des services secrets
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