Abousoufiane Elkabouss
Dans une démonstration rare mais profondément symbolique de désespoir collectif, les habitants de la vallée d’Aït Bouguemez, nichée au cœur du Haut-Atlas, ont pris une décision forte : marcher à pied vers la wilaya de Beni Mellal, contournant volontairement la préfecture d’Azilal. Ce choix n’est pas anodin. Il traduit un cri de colère et une rupture totale de confiance envers les responsables locaux, jugés absents, sourds et inactifs face à la misère grandissante de cette région
Depuis des décennies, la population d’Aït Bouguemez endure un isolement criant. Les routes sont impraticables ou inexistantes, la couverture téléphonique reste un luxe, les soins médicaux sont rares et mal répartis, et l’accès aux services de base demeure une lutte quotidienne. La vallée, pourtant surnommée « la vallée heureuse », ne l’est plus que de nom pour ses habitants
Cette marche pacifique vers Beni Mellal n’est pas seulement une révolte contre l’abandon. C’est un appel au secours, un acte de foi en l’État, dans l’espoir qu’à un niveau supérieur, les doléances trouveront une oreille attentive et des réponses concrètes
Ceux qui marchent aujourd’hui ne demandent pas des privilèges, mais des droits élémentaires : une route pour rejoindre l’hôpital, un réseau téléphonique pour alerter en cas d’urgence, un dispensaire pour soigner un enfant fiévreux, un peu de considération pour une région oubliée.
L’indifférence prolongée devient une injustice. Et face à cette injustice, la dignité des citoyens d’Aït Bouguemez les pousse à marcher non pas contre l’État, mais pour leur droit à vivre décemment dans leur propre pays
Il est temps que les responsables écoutent. Il est temps que la montagne parle, et que sa voix porte loin
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